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vendredi 23 avril 2010

Ahamedou Bamba Lhafed : «Il n’y a pas de liberté d’opinion dans les camps de Tindouf»


Ahamedou Bamba Lhafed, ancien journaliste dans les camps de Tindouf, affirme que le Polisario accorde toute l’importance à la question des droits de l’Homme au Sahara et ferme les yeux sur les violations constantes de ces droits dans les camps de Tindouf.

ALM : Parlez-nous de votre carrière de journaliste dans les camps de Tindouf ?
Ahamedou Bamba Lhafed : Je suis né à Tindouf en 1981. Lauréat de la Faculté de presse et littérature en Libye, j’ai travaillé comme journaliste à la chaîne de radio et à la chaîne de télévision du front Polisario pendant plusieurs années. En réalité, nous travaillions dans des conditions très difficiles en raison de l’absence des moyens et matériels nécessaires. Nous ne recevions pas régulièrement notre salaire. En effet, nous étions obligés de supporter les frais de travail et des déplacements le cas échéant grâce au soutien financier de nos proches.

Que dites-vous des conditions de l’exercice du métier de journaliste dans ces camps ?
Les médias dans les camps de Tindouf sont dirigés et orientés dans l’intérêt du Polisario et de sa propagande. Les lignes rouges sont très nombreuses. Nous n’avions pas le droit d’aborder les problèmes sociaux des camps sauf dans des cas très limités tolérés par la direction du front Polisario. Il était question de ne pas présenter le front comme étant loin des masses. Grosso modo, on ne peut pas parler de travail journalistique en bonne et due forme dans les camps. La politique du Polisario consistait à ne jamais refléter une image critiquable de lui en le présentant comme une entité qui s’écarte des bases.

Quel commentaire faites-vous des méthodes de traitement des informations par les médias du Polisario ?
Il est d’usage que les informations qui parviennent des provinces du Sud du Maroc sont tout le temps amplifiées. Le Polisario les vide de leur substance. Des fois même on inventait des informations. Ces dernières années, certains sujets ont occupé une position de premier plan dans le traitement des informations, notamment les activités des défenseurs des droits de l’Homme. Le Polisario accorde toute l’importance à ce sujet dans le souci de gagner la sympathie de la communauté internationale. Les médias du Polisario ne parlent plus que de ce qu’ils qualifient de violations graves des droits de l’Homme au Sahara. Il réserve également une place importante à la question des négociations sur l’avenir du Sahara dans le traitement des informations. A ce sujet, il faut dire que le Polisario n’a pas pris la peine d’expliquer le contenu de la proposition marocaine d’autonomie à travers ses médias. Bien au contraire, le projet d’autonomie est présenté d’un point de vue négatif.

Comment sont les conditions de vie de la population séquestrée de Tindouf ?
La population dans les camps de Tindouf vit dans des conditions précaires. Elle est loin des instances de décision. Sa principale préoccupation est de survivre dans ce milieu très dur. Ces derniers temps, beaucoup de gens ont fui les camps et les autres qui sont restés n’ont pas les moyens pour rejoindre la mère patrie. A vrai dire, survivre dans les camps de Tindouf dépend des aides humanitaires internationales. Et, malheureusement, la population de Tindouf ne reçoit qu’une partie de ces aides, le reste est réservé à d’autres personnes bien déterminées. L’émergence de groupes islamistes intégristes est aussi un autre problème de plus en plus inquiétant dans les camps.

Quelle est la grande injustice commise par le Polisario à l’égard de cette population ?
En tant qu’ex-journaliste, je connais tous les rouages des camps de Tindouf. Il est paradoxal et intolérable de constater que le Polisario accorde toute l’importance à la question des droits de l’Homme au Sahara au moment où il ferme les yeux sur les violations constantes de ces droits-là et qui sont commises dans les camps de Tindouf. En dernier lieu, il faut dire que la population de Tindouf souffre énormément de ce conflit qui n’a que trop duré.

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